Après Souvenirs d’un Futur, le photographe Laurent Kronental présente son nouveau projet Les Yeux des Tours. Où il nous invite à regarder par les fenêtres des célèbres tours Aillaud de Nanterre.
Situées à Nanterre dans le quartier Pablo Picasso, les 18 tours Aillaud ont été érigées par l’architecte du même nom entre 1973 et 1981. Surnommées tours Nuage, elles sont un ensemble immobilier situé dans le quartier Pablo Picasso à Nanterre, dans la banlieue de Paris. Ces tours regroupent 1 607 appartements, recouvertes de mosaïques de Fabio Reiti qui évoquent des nuages. Depuis toujours, elles ont attirent l’oeil des artistes, architectes et designers. La volonté de Emile Aillaud était que “Toute la préoccupation de mon architecture est de brouiller les pistes, d’effacer les traces.” Il voulait “briser la traditionnelle orthogonalité des grands ensembles pour adopter des formes plus diverses. Les fenêtres, carrées, rondes ou en forme de goutte d’eau se veulent résolument poétique.”
De ces formes cylindres accolés, quelle est la perception de ses habitants ? Que voit-on de là-haut à travers ces fenêtres extraordinaires ? Le photographe Laurent Kronental nous y invite à travers sa nouvelle série Les Yeux des Tours.
Laurent Kronental est fasciné par les aventures architecturales autant que par son idéal utopiste sous-jacent. Ici, le photographe nous introduit à l’intérieur même du bâtiment, franchissant le seuils des portes et regardant à travers des fenêtres qui s’ouvrent sur des hauteurs vertigineuses, des horizons tentaculaires et des ciels immenses. L’oeil se laisse aller dans le spectacle sensuel de cette ville qui s’embrasse au crépuscule ou de ces tours qui filent jusqu’au ciel. Pourtant, ces vues à couper le souffle ne sont que de simple réflexion sur le quotidien de ces résidents. Elle n’est que l’arrière-plan d’une vie quotidienne. La cuisine, le lit, le canapé se mélangent ainsi aux paraboles, façades, lumières urbaines. L’intérieur entre ainsi en résonance avec l’extérieur dans un dialogue où s’instaurent de multiples nuances. L’oeil du photographe vous invite à ne pas errer dans l’infini envoûtant du paysage. Il vous renvoie à ce regard qui rend humain. Il trouve la limite, le cadre ou plutôt l’encadrement de ces vies toutes en symbole.
Cette série rappelle que la perspective n’est rien sans le point de vue, que la scène n’est que le reflet ou l’ombre de celui qui la contemple, autorisant ainsi toutes les transfigurations, tous les fantasmes. Le regard retrouve alors son sens premier et devient l’autre nom de la fenêtre. Les Yeux des Tours s’ouvrent et voient soudain le paysage bétonné prendre sens. Le rêve futuriste du bâtisseur, confronté à la durée et à l’existence, se prolonge en une ultime illusion : celle de voir réunis sur un même plan le passé, le présent et le futur.
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À propos de l’auteur
Laurent Kronental est né en 1987. Il vit et travaille à Paris (France). Photographe autodidacte, il découvre la photographie en Chine lors d’un séjour de plusieurs mois à Pékin. Il a été captivé par les grandes métropoles et la variété de leurs architectures, leurs habitants, la manière dont ils apprivoisent l’espace et leurs histoires personnelles. Il a développé de 2011 à 2015 sa première série artistique, “Souvenir d’un Futur“, sur les personnes âgées vivant dans les grandes propriétés de la région parisienne. Le photographe a l’intention de nous interroger sur la condition des seniors dans ces lieux en mettant en lumière une génération parfois négligée. Il pousse un autre regard sur des zones suburbaines souvent sous-estimées dont les murs semblent vieillir lentement et emporter avec eux le souvenir d’une utopie moderniste.
“Souvenir d’un Futur” a été nominé et distingué dans les prix photographiques internationaux. En 2015, cette série a permis à Laurent Kronental de remporter la “Bourse du Talent” dans la catégorie paysage. Il a ensuite été exposé à la Bibliothèque Nationale de France qui a intégré ses images dans sa collection photographique. Le photographe a été sélectionné et récompensé en 2016 au Festival Circulations (Festival de la jeune photographie européenne) où il a reçu le prix du public. Il a également été finaliste des prix Lens Culture Exposure Awards la même année. Son travail a été exposé à Paris, Moscou, Londres, Athènes, Séoul et publié dans de nombreux magazines en France et à l’étranger, notamment le Washington Post, le British Journal of Photography, The Guardian, National Geographic, Wired, CNN, Le Monde, L Obs.
