Voici ma petite sélection des albums de 2017. Comme la tradition le veut, il est temps de vous parler des albums et des artistes dont j’ai pris plaisir à écouter, écouter et écouter encore durant toute l’année dernière.
Tout d’abord, il ne s’agit pas ici d’un classement, de savoir qui a été mieux que l’autre, qui sera bon premier et qui sera bon dernier. Il s’agit plutôt d’une préférence, voire même d’une évidence. La volonté de vous partager des albums aux styles divers et variés et qui m’ont marqué chacun à leur manière. En fonction du moment, des artistes et de leur musique.
Il y a bien sûr des références, mais d’autres qui ne figurent pas dans ce top. Il n’y a, selon moi, aucun intérêt à mettre encore une fois en avant Kendrick Lamar, SZA, King Krule, Julien Baker ou encore LCD Soundsystem. Certes, chacun à leur manière ont marqué également mon année 2017, mais ils marquent tous suffisamment déjà les tops des autres médias ici et là. Bien sûr, écoutez les également. Du coup, je fais la part belle, à la découverte, parce que la curiosité est bien nécessaire. Et surtout à mes évidences. Voici donc un melting-pot de mes albums préférés qui sont passés dans mes oreilles en 2017. Prenez cette liste dans l’ordre et le désordre, c’est comme vous voulez, mais prenez le temps de vous laissez aller. Avec la playlist à la fin qui regroupe encore plus d’albums pour encore plus de bons sons.
Bonne écoute 🎧
Dude York – Sincerely
[indie rock – pop punk] Comme à chaque fois, Dude York fait mouche à oreilles. Grande sensation de mon année 2013 grâce à leur premier album Dehumanize, dans le top du classement de l’année, pas loin des Parquet Courts et Fidlar. Dude York est de retour en 2017 avec Sincerely, après avoir pris son temps. Et le trio indie rock/pop punk n’a rien perdu de sa superbe. Bien au contraire. Sous couvert d’un rock bien plus puissant, Dude York dissimule les thèmes de l’anxiété et l’érosion de la santé mentale à travers son nouvel album. Un album où Peter Richards (frontman du group) parle sans remords et regrets de ses problèmes. Un album rock, parfois à la limite de la power pop avec ses distorsions massives et ses tambours frappés. Parce que quand rien de fonctionne, le plus simple reste encore de faire le plus de bruit possible et de frapper fort.
Moses Sumney – Aromanticism
[soul – folk] Avec sa voix suave et douce, Moses Sumney émerveille son auditeur. Ses magnifiques chansons entre soul et folk, riches de mille strates hypnotiques, font penser à la richesse de Sufjan Stevens et au spiritisme de Bon Iver. Sa voix umineuse au falsetto hypnotique s’enrichit de productions plus ambitieuses, d’un song-writing singulier et de performances live de plus en plus marquantes. Dans son premier album, Moses Sumney chante l’amour et son manque cruel. Tel le prophète, il tient certainement son inspiration d’une étoile divine. Souhaitant guider vers la lumière et un certain bonheur romantique, mélancolique et personnel avant tout.
Petit Fantôme – Un Mouvement pour le vent
[indie pop] Petit Fantôme est le pseudonyme évasif et mystérieux de Pierre Loustaunau, multi-instrumentiste intrépide qui officiait auparavant auprès de Frànçois & The Atlas Mountains, Crane Angels, Le Pingouin ou encore Iceberg. Longtemps émancipé par le collectif et désormais entièrement dévoué à son projet solo, et c’est tant mieux pour nous. Car Petit Fantôme ne ressemble à personne et ne fait que ce qui lui plaît contre vents et marées. La preuve avec son premier véritable album Un mouvement pour le vent, d’une fraîcheur pop devenue beaucoup trop rare. Un mouvement pour le vent fourmille d’idées, de trouvailles et de pop songs à l’évidence immédiate. Serpentant entre pop romantique et noisy brumeuse, passant de l’une à l’autre avec une agilité déconcertante, une aisance désarmante.
Mount Eerie – A Crow Looked At Me
[folk] Que 2016 fut éprouvante pour Phil Elverum qui nous raconte sans pudeur son deuil sur son A Crow Looked At Me. Incroyablement bouleversant, cet album raconte la perte tragique de sa femme, qui collabora beaucoup au projet Mount Eerie. Après la naissance de leur enfant, Geneviève Castrée fut diagnostiquée d’un cancer de pancréas. Toute la communauté indie se mobilisa pour collecter les fonds pour la suite du traitement. Malheureusement, elle disparue le 9 juillet 2016. Phil s’enfermera dans la chambre où elle est décédée jusqu’en décembre 2016 pour composer ce sublime et touchant album où il recolle les souvenirs passés de leur amour. Un album de deuil à mettre dans toutes les oreilles afin de ne jamais oublier l’essentiel.
The War On Drugs – A Deeper Understanding
[rock americana] Difficile de faire mieux que le précédent et excellent Lost In The Dream ? Adam Granduciel et sa bande ont décidé de faire au moins tout aussi bien. Devenant ainsi les artisans d’une americana planante et indispensable. Calexico, Bruce Springsteen, Bob Dylan, Brian Eno ou encore Neil Young. Depuis plus de dix ans, le rock d’Adam Granduciel navigue et s’épanouit sous de multiples pavillons. Et qu’importe si ce discret leader est devenu rapidement le seul maître à bord si son ancien acolyte Kurt Vile est parti explorer les contrées folk. Rien de neuf sous le soleil, okay, mais un alignement de chansons qui fonctionnent avec une évidence naturelle. Peut-être trop parfois. À vouloir garder coûte que coûte le cap, The War On Drugs dérive parfois vers la redite. Mais difficile de bouder son plaisir néanmoins devant ce rock devenu classic. Authentique et frissonnant.
Phoenix – Ti Amo
[pop à l’italienne] On les connaissait synth-rock, potes de l’excellence French Touch, tellement séduisants mais si peu reconnu en France, couronnés de leur talent avec Lisztomania, headliners à Coachella, Bankrupt! n’aurait été qu’un passage à vide pour certains, pour d’autres un retour aux normes. Ces dernières années, Phoenix aura toujours su faire parler d’eux comme étant le plus grand groupe de rock français à l’étranger et les voilà de retour avec un album plus pop tu meurs. Phoenix n’aura jamais été autant déroutant que séduisant. À contre-courant des conventions, ils se sont laissés aller et c’est exactement ce qu’il faut faire en écoutant Ti Amo. Un album qui frôle parfois avec le kitsch, la décadence, le trop plein de romantisme, pourtant ce sixième album de Phoenix est d’une douceur infinie, un voyage lumineux et dansant au coeur de l’Italie pop et passionné. À écouter jusqu’à la dernière goutte. Che figata!
Hector Gachan – Untitled’ 91
[indie pop – lo-fi] Élevé entre Sydney et Sarajevo, Hector Gachan est un musicien aux multiples influences qui s’inspire largement de sonorités indie pop lo-fi. Ne pensez pas que cet album éponyme n’a pas de grandes ambitions malgré son esthétique forcément slacker. À l’écouter, vous y trouverez aussi bien de la chillwave façon Neon Indian, que des incursions glam dans l’univers de Soft Hair, sans oublier les rêveries enjoués et psyché de Panda Bear période Person Pitch, l’ensemble rythmé par le groove lo-fi de Part Time. Résolument do-it-yourself, Hector Gachan écrit sur les turpitudes de sa vie, ces impressions sur Donald Trump ou encore son exaspération face aux hooligans. Des textes drôles, parfois décalés ou encore mélancoliques qui rappellent ceux de Mac DeMarco et de John Maus. Deux autres parrains dont le jeune australien se revendique. Sans jamais faire dans le simple copier-coller, Hector Gachan développe ses propres tubes simplistes au goût doux-amer, aussi attachants qu’entraînants. Il livre ainsi onze chansons pop et autant de petits hymnes de bedroom music. Idéal pour passer l’hiver au chaud.
William Z Villain – William Z Villain
[folk] Le mélomane sait bien qu’il faut regarder dans la marge depuis quelques années pour arriver à trouver son bonheur musical, les majors réservant leurs signatures pour alimenter NRJ et Youtube. On ne remerciera donc jamais assez les labels indépendants de faire encore (et toujours) ce travail de passionné, dans un monde dématérialisé et désensibilisé par des consommateurs qui n’ont plus le temps ni l’envie et encore moins l’argent à consacrer à quelques chansonniers passionnants. La preuve avec cette découverte formidable qu’est William Z Villain, hors des sentiers battus.
Canari – Désamorceur
[soft indie rock] Mettez de côté le gros minet et laissez-vous entraîner dans une power-trio spectaculaire, psychédélique et ethnique. Canari siffle un vent de fraîcheur sur l’indie française grâce à son soft rock à guitare et tubes underground qui ne laissera pas indifférent votre grand-mère. Désamorceur est de toute évidence un des grands albums de la scène underground et nous pouvons remercier encore une fois La Souterraine.
Bohdi – Bohdi
[hip hop] Dans le bouddhisme, Bodhi désigne la délivrance, l’illumination. Il est l’objectif ultime de la vie d’un bouddhiste. À une alternance de lettre prêt, on est quasi dans la même idée. Car de Bodhi à Bohdi, il n’y a que la musique en plus. Ça ne s’écrit pas pareil mais l’illumination est toujours aussi forte. La délivrance tout autant. Un premier album sorti d’un peu nulle part et Bohdi a été mon gros coup de coeur de l’été dernier. Simple et efficace.
Aquaserge – Laisse ça être
[indie pop et plus si affinités] Avec sa pop totale et en tout point sophistiquée, Aquaserge est revenu avec un nouvel album en début d’année dernière, plus merveilleux encore que les précédents. Laisse ça être confirme encore que l’excellence de leur musique ne pourrait rentrer dans une case, aussi large soit-elle. Poétique, fantastique, dansante, irrévérencieuse, unique, tenace. Bienvenue dans une incroyable odyssée musicale à travers les souterrains de la belle et grande pop. À consommer sans modération. Et merci La Souterrain bien sûr.
Leif Vollebekk – Twin Solitude
[soul – folk] Sensible et d’une grâce infinie, Leif Vollebekk rappelle aux doux souvenirs de Jeff Buckley. C’est pourtant du côté de Nick Drake et de son Pink Moon qu’il faut voir. Avec son troisième et délicieux album Twin Solitude, avec dix chansons à peine, Leif Vollebekk marque définitivement son nom au firmament des musiciens soul et folk. Une des excellentes surprises de cette année, de loin.
Isaac Delusion – Rust & Gold
[dream pop – soul] Ce sont les yeux grands ouverts que vous écouterez les nouvelles mélodies d’Isaac Delusion. Le rêve du premier album terminé depuis belle lurette, c’est au tour de Rust & Gold de nous émerveiller à nouveau. Dans ce nouvel album, les mélodies suaves et les compositions vaporeuses laissent place à un coeur battant. Celui d’un réveil défiant toutes les lois de la gravité. C’est toujours à l’ombre de ce sommeil fragilisé qu’Isaac Delusion imagine sa musique fantasmée, avec toujours autant d’agréable légèreté. Tout en douceur avec leur dream pop toujours aussi magique. Une musique en or et avec un talent très loin d’avoir rouillé.
Rex Orange County – Apricot Princess
[indie à l’anglaise] Les chansons vaporeuses d’Alex O’Connor capturent parfaitement le sentiment d’être jeune et amoureux. Apricot Princess est sorti en avril de l’année dernière, mais il semble être aujourd’hui le remède idéal à la mélancolie froide de l’hiver. De la douce romance à l’anglaise à écouter bien au chaud au comptoir. Les genres musicaux, Rex Orange County n’a pas l’air de s’en soucier beaucoup. C’est quoi, du rock ? Du rap ? De la pop ? D’ailleurs ce n’est pas parce qu’il pose sa voix sur une chanson du dernier Tyler, The Creator qu’il choisit son camp pour autant. Comme avec King Krule, Declan McKenna ou Cosmo Pyke, on ne sait pas trop. Tant mieux pour nous.
Fazerdaze – Morningside
[indie pop] Vous n’avez pas idée tout ce qu’a déjà pu accomplir Amelia Murray, aka Fazerdaze, avant de sortir son premier album. La nouvelle it-girl de la scène indie néo-zélandaise a récolté les louanges de NME, joué avec Unknown Mortal Orchestra et Connan Mockasin, et a été invitée à rejoindre la Red Bull Music Academy à Montréal en 2016. En mai dernier, elle sortait ainsi Morningside, une belle démonstration de son songwriting si complexe. Aujourd’hui, son single Lucky Girl culmine a plus de 3 millions de vues sur Youtube. Preuve que la musique de Fazerdaze a déjà su captiver les foules.
Jake Xerxes Fussell – What in the Natural World
[blues folk] Comme l’impression d’être retourné à la belle époque du Greenwich Village où des chanteurs pas encore connus chantaient les louanges des légendes et vertes plaintes de l’Amérique. Sans nostalgie pour autant, Jake Xerxes Fussell a ce talent de ne pas tremper son folk dans les nouveautés contemporaine d’aujourd’hui. Le plus important reste sa guitare et ses histoires comme si elles étaient contés au petit matin près du feu. What in the Natural World est un album de reprises, beaucoup de chansons des années 1920, et rien de mieux à écouter dans cette nouvelle Amérique qui a viré de bord.
Juliette Armanet – Petite amie
[chanson pop française] Juliette Armanet pourrait bien être celle, simple, rare, qui s’imposerait comme la Petite Amie la plus trendy du moment dans la chanson française. Toujours accompagnée de sa « bête noire », son piano, éternel partenaire de crime et de danse, la délicate confie depuis plus d’un an maintenant ses douces folies sentimentales à un public de plus en plus grandissant. Entre nostalgie et humour, elle a su créer autour de ses mélodies charnelles et sensibles une aura originale, entre le rose et le noir. On parle de Juliette Armanet comme de l’héritière de Véronique Sanson, Michel Berger et William Sheller – rien que ça. Comme eux, elle joue des chansons d’amour sur un piano plus mélodieux et lyrique que jamais. Comme eux, elle connaître certainement le même succès critique au fur et à mesure des compositions. Il faut dire que son premier album Petit Amie sorti le 7 avril dernier était une réelle révélation.
Nick Mulvey – Wake Up Now
[folk] Deux ans après First Mind, un premier album acclamé et porté par l’inoubliable Cucurucu, le très attendu Nick Mulvey est revenu avec Wake Up Now. Songwriting toujours aussi impeccable, à la fois rythmé et lumineux. Calme et volupté ont toujours été les maîtres mots du folk de Nick Mulvey. Sa musique se veut linéaire et mélodique avant tout, pas d’accord grattés, plutôt un fingerpicking précis et hypnotique. Une musique sans cesse en mouvement. La seule idée est de donner vie aux mélodies que laissent exploser sa voix chaleureuse. Et sur Wake Up Now, Nick Mulvey libère plus encore cette folk hybride. Livrant ses pensées sur un album à la beauté simple et captivante. Une succession de petits miracles sensibles.
Obasi Shaw – Liminal Minds
[hip hop] Certains écrivent des pavés en Times New Roman corps 12 interligne 1,5, et puis il y a Obasi Shaw qui en fait un album de hip-hop. 20 ans, cet étudiant de la faculté à Harvard a présenté le 18 mai dernier son album Liminal Minds en guise de thèse de fin d’année. Rien à dire. Génie.
The Babe Rainbow – The Babe Rainbow
[néo-psyché] Aussi cool que ringard, The Babe Rainbow a été ma madeleine de Proust durant 2017. Pas l’album le plus génial du monde, mais suffisamment fun pour prendre plaisir à l’écouter simplement, sans prise de tête. Porté par certains titres vraiment excellents, mais d’autres sans grand intérêt. Un premier album entre les eaux qui porte le zest de psyché qu’il faut néanmoins.
Écoutez la grande playlist des albums de 2017
Sans oublier d’écouter également et toujours dans le désordre, tous les albums de King Lizard & The Gizzard Wizard sortis en 2017, À ta merci de Fishbach, Thawing Dawn de A. Savage, Stranger in The Alps de Phoebe Bridgers, Capacity de Big Thief, Guilty Species de Jessica 93, le dernier de Ty Segall, Bad Habits de Silicon Valley, Love What Survives de Mount Kimbie, Everybody Workds de Jay Som, Joli Mai de Daphni, Migration de Bonobo, Jlin de Black Origami, Brick Body Kids Still Daydream de Open Mike Eagle, Flower Boy de Tyler, the Creator, Vince Staples de Big Fish Theory, Sheer Mag, Salutations de Conor Oberst, Party de Aldous Harding, Play Me Again de Conor Oberst, Modern Life Vol.1 de Satellite Jockey, Harry Styles, Courtney Bartnett & Kurt Vile, The Surfing Magazines ou Stupeflip.