Je suis curieux, sans trop m’en rendre compte, c’est comme respirer, comme une nécessité pour aller de l’avant, me trouver ou me retrouver. Cette curiosité prend vie à travers mes rencontres, mes discussions, mes lectures, mes écoutes, mes clics, mes promenades, mes temps passés en concert, au ciné ou au musée… j’essaye tant bien que mal de comprendre ce qui m’entoure, toutes personnes ou toutes choses, de près ou de loin. Quelque soit les sujets, sans préjugés, sans ornières, tout m’intéresse. Chaque jour et le plus possible, je m’efforce de me nourrir de curiosité, de comprendre, d’apprendre et alors de savoir. Jusqu’à essoufflement ces derniers temps. Certainement par trop de tout et tout le temps. Ce que je sais de ces derniers mois est que j’éprouve un soulagement de ne plus chercher à savoir, voir même de ne plus savoir du tout.
“Que voulez-vous dire ?” selon Facebook, “Quoi de neuf ?” selon Twitter, donner son avis, partager sa vie et consommer celle des autres. De plus en plus, nous existons à travers nos prises de paroles, consommant par gourmandise celles des autres. Connectés ou non, nous subissons ce torrent d’information personnelle et médiatique, boosté par l’égo de chacun et par nos clics compulsifs. Parce que l’espèce sociale que nous sommes aspirera toujours à créer des liens, tout type de lien, physique ou virtuel, mais surtout virtuel en ces temps de crise sanitaire. Alors nous créons des liens d’un claquement de doigts et nous nous connectons les uns ou autres d’un tapotage de pouce comme les Petite Poucette que nous sommes. Notre smartphone dans la main nous offre une nouvelle manière d’être et de connaître. Tapotant sur l’écran à la conquête d’une infinité de connaissance, d’informations, d’explications, de faits, de discours, de prises de position… Une infinité de contenus en libre accès, sans attendre, sur le moment, sans filtre, sans cesse. Et la crise que nous connaissons est bien virale, mais pas forcément celle du virus star de l’année.
Il est bon alors de ne plus savoir, de ne plus chercher à savoir, de ne plus s’en rendre malade. Se déconnecter de cet angoissant engrenage de contenu viraux, plus ou moins faux, de cette grande salade indigeste. Car tout se forme et se déforme sur Internet et ses réseaux sociaux, sa force comme sa plus grande faiblesse… Tout s’apprend, tout se sait, tout se comprend, mais encore faut-il avoir le contexte, le recul, le temps, l’énergie. Et faute de tout cela, le savoir se transforme fatalement, en pire bien souvent, pauvre de lui. Au bout des doigts d’abord, puis dans notre bouche ensuite, cela pour mieux argumenter avis et discours. On consomme et on partage à la vitesse de la fibre ces savoirs augmentés, sinon l’angoisse de ne pas savoir arrive plus vite encore, avec l’égo comme moteur et le mensonge comme essence. On a beau chercher à savoir, on ne saura jamais tout, on en retiendra pas plus, on comprendra si peu, c’est devenu trop difficile de savoir. Alors j’ai appris à ne plus savoir, et je vous invite à faire de même. De prendre le temps de vivre aujourd’hui avec les incertitudes de demain. Elles seront toujours là de toute façon, malgré tout le savoir que vous aurez pu trouver ici et là. Alors si on vous demande si ça reconfine, répondez tout simplement “je ne sais pas.”